Journée internationale de la visibilité bi: parlons de la biphobie

Le 23 septembre, nous célébrons la journée mondiale de la visibilité bisexuelle et de la lutte contre la biphobie!

Une journée pleine de sens pour la communauté bisexuelle qui est trop souvent invisibilisée et ce, pour différentes raisons. Non, la bisexualité n'est pas "une phase". Non, une personne bisexuelle n'est pas "un-e un gay/lesbienne qui ne s'assume pas". Non, les personnes bisexuelles ne sont pas des "personnes qui ne savent pas choisir".

La Fédération Prisme a rencontré Jason, Lyne et Claudia qui nous ont partagé leurs expériences face à la bi/panphobie dont ils/elles ont été victimes durant leur parcours...

Pourrais-tu te décrire brièvement (âge, région, profession, ...) ?

Jason: Je m’appelle Jason. Je suis un jeune étudiant de 21 ans en infographie de la région de Charleroi. Ayant longtemps pensé être bisexuel, je me rends compte que je penche de plus en plus vers la pansexualité (même si je ne suis pas très à l’aise avec les étiquettes en général) .

Claudia: J'ai 40 ans, je suis originaire du Hainaut. Je suis diplômée en tant qu'assistante sociale. Je suis pansexuelle.

Lyne: J’ai 25 ans, je vis à Bruxelles, je travaille dans le milieu associatif.

Selon toi, qu'est-ce que la biphobie/panphobie ? Comment la définirais-tu ?

Jason: Selon moi, la bi/panphobie est un rejet ou une peur (qui, je pense, découle d’un manque de connaissances) de toute personne se sentant bisexuelle (être attiré-e romantiquement ou sexuellement par les hommes et les femmes avec plus ou moins de préférences) ou pansexuelle (aimer ou être attiré-e sexuellement par la personne pour ce qu’elle est, indépendamment de son genre ou de son sexe assigné à la naissance).

Claudia: C'est une oppression systématique des personnes bisexuelles/pansexuelles. Elle fait partie des oppressions systématiques subies par les LGBT. Elle fait partie des oppressions subies par les personnes racisées, les personnes en situation de handicap, les femmes (trans*, inter* ou cis), les personnes grosses, les personnes malades mentalement, ... Cette oppression peut se manifester par de l'hostilité, de la haine, de la violence verbale, psychologique, physique, des discriminations, des stéréotypes, ... Et elle peut être le fait de personnes elles-mêmes opprimées. Par exemple, les personnes homosexuelles peuvent très bien agir de façon biphobe ou panphobe.

Lyne: La biphobie est l’ensemble des discriminations vécues par les personnes bisexuelles (voir aussi pansexuelles). Elles sont historiquement documentées, et se retrouvent dans la communauté LGBTI+ comme dans les groupes de personnes hétérosexuelles. Elles s’expriment différemment selon le genre de la personne et son origine ethnique, car le sexisme et le racisme sont également prévalent dans nos sociétés. Les normes imposées aux différents genres jouent beaucoup sur l’origine des discriminations biphobes. Ces discriminations peuvent être activement exprimées, implicites, intériorisées, ou se manifestent par l’invisibilisation des personnes bi des espaces publiques et privés.  

Quel type de biphobie/panphobie as-tu déjà expérimenté ?

Jason: J’ai expérimenté la bi/panphobie ordinaire. C’est-à-dire que je n’ai jamais eu d’insultes directes ou d’agressions du fait de mon orientation, mais plutôt un sentiment général différent en ma présence, ou des changements d’attitude et de comportement.

Je pense que cela est dû au fait que j’ai physiquement toutes les caractéristiques d’un hétéro cisgenre selon les codes de notre société hétéronormée. Souvent j’entends dans mon entourage lorsque l’on parle de genre et d’orientation : « Ouais mais toi ça va, ça ne se voit pas». C’est littéralement quelque chose que j’ai entendu mille fois dans ma vie. J’ai juste envie de leur demander comment ils arrivent à connaître l’orientation des gens d’un seul coup d’œil en fait … et même si ça « se voyait », qu’est-ce que ça changerait …

Claudia: Généralement, on a nié ma pansexualité, disant que je suis pansexuelle "parce que c'est à la mode", pour "exciter les hommes". Qu'il n'y a pas plus "femme hétéro que moi" (je suis agenre, également).

On m'a souvent dit qu'on n'est pas bi ou pansexuel.le, mais que c'est juste qu'on n'a pas encore choisi (des amis gays).

Souvent, c'est de l'ordre de la moquerie ou de la vanne. Surtout en anglais, que je pratique quotidiennement : "tu es pansexuelle, ça veut dire que tu es attirée par les poêles ? (pan = poêle) ahahah".

Bref, sous couvert d'humour, on fait passer plein de bêtises.

J'ai aussi subi à maintes reprises l'habituel : "je peux regarder ?" venant d'hommes, présumés cis hétéros, excités par les relations sexuelles entre femmes.

Puis je ne sais pas si c'est de la bi/pan phobie mais j'ai eu des petites-amies qui se disaient bi mais qui dès qu'un homme pointait le bout de son nez filaient avec l'homme, me laissant sur le carreau. J'ai un peu l'impression qu'elles préféraient les hommes et haïssaient leur penchant pour les femmes.

Et puis, gamine, j'ai été identifiée comme gay erronément dans ma famille (je n'étais pas outée du tout et je n'étais pas consciente d'aimer les femmes aussi) et mon père était violent, m'a traitée de pute et de salope très jeune en me soupçonnant de coucher avec ma meilleure amie de l'époque. Donc j'ai aussi subi de la violence...

Mais peu de violences en rue etc. car je ne me suis jamais baladée main dans la main avec une fille... Ce qui aurait été une agression lesbophobe vu qu'on aurait été identifiée comme lesbiennes...

Lyne: Tout d’abord il y a celle de la reconnaissance de sentiments romantique pour les personnes du même genre que moi dans une société où les femmes sont hypersexualisées, et où l’hétéronorme est présente dans toutes nos interactions. Cette barrière a été pour moi la plus importante à passer. La biphobie subie par les femmes et les minorités de genre a tendance à nier la légitimité des sentiments éprouvés pour d’autres femmes, sentiments que j’avais intérioriséesgrandement. Ensuite, une fois que j’ai accepté de donner de la légitimité à mes sentiments, j’ai été confrontée à la peur de l’exclusion dans les communautés lesbiennes, où la biphobie n’est pas forcément explicite mais semble planer dans l’air ambiant. Ce sentiment m’a trop longtemps freiné les possibilités d’expression libre et le sentiment de légitimité dans la communauté LGBTI+ ; surtout quand cela se confirme car les remarques biphobes tombent. Enfin dans les groupes et espaces hétérosexuels, j’ai vécu trois phénomènes : d’un côté l’hypersexualisation de la part d’hommes (amis ou inconnus), de l’autre côté l’injonction que mon identité queer s’efface car j'ai une relation avec un homme, et enfin la délégitimation de mes relations avec des femmes.

Pourrais-tu expliquer la première fois où tu as expérimenté cela (ou celle qui t'a le plus marquée) ?

Jason: Une fois qui m’a réellement marquée, c’est la réaction d’un ancien ami il y a quelque temps. En effet, c’était un très bon ami dont j’étais très proche, tout le monde connaissait dans mon entourage mon orientation (je ne la criais pas partout mais je ne la cachais pas non plus) et lui était totalement au courant depuis longtemps. Il me disait qu’il s’en fichait, mais j’ai compris que ce n’était pas vraiment le cas après avoir passé des vacances avec lui et un groupe d’ami-e-s. Je l’ai senti extrêmement distant tout du long sauf quand nous étions seuls à deux où il était totalement normal. Étonné de cette attitude, je lui ai demandé les raisons de ce comportement une fois rentrés de vacances. Il m’a clairement dit qu’en groupe ou en société, il ne voulait pas montrer qu’on était proche par peur que les gens s’imaginent quelque chose …. En d’autres termes, le regard des gens, même de nos amis proches communs, influait son attitude face à moi (ce qui n’aurait évidemment jamais été le cas avec un ami hétérosexuel). Cette réponse m’ayant beaucoup choqué, j’ai essayé de lui expliquer que c’était totalement homo-bi-panphobe et qu’il n’aurait jamais réagi comme ça avec une autre personne de la même orientation que lui. Il m’a rétorqué assez violemment que le simple fait qu’il soit ami avec moi démontrait qu’il n’était pas homophobe … Ces remarques, évidemment homophobes, m’ont vraiment choqué, mais le plus difficile était de concevoir que, selon lui, traiter un ami différemment parce qu’il a une autre orientation n’est pas homo-bi-panphobe …. La relation s’est peu à peu dégradée au fil du temps et nous ne nous parlons plus aujourd’hui.

Claudia: C'était mon père, donc. On avait fait des tests hormonaux qui montraient des pics de testostérone "anormaux" chez moi. Il en a déduit qu'il pouvait me casser la figure et me harceler de questions sur ma meilleure amie et m'empêcher de la voir.

Lyne: La première était la remarque d’une personne à la première soirée de femmes queer où je suis allée, où on m’a rétorqué “tu as une tête d’hétéro” à un moment de questionnement sur mon orientation sexuelle. Cette remarque m’a heurté car je me savais “pas hétéro”, mais voilà que cet espace, qui est censé être bienveillant, vient me “remettre à ma place”. Je pense que cet incident a ajouté 4 ans à ce que je sois assez confortable pour être out en tant que bisexuelle.

As-tu déjà expérimenté un rejet/de la bi-panphobie au sein des communautés LGBTQI+ ? Si oui, peux-tu expliquer les comportements auxquels tu as été face ?

Jason: ÉVIDEMMENT. C’est peut-être même là que j’ai entendu le plus de remarques déplacées.

Ce rejet est surtout présent sur les sites de rencontres (je ne fréquente pas trop les lieux dits LGBTQI+). En effet, soit c’est inconcevable de sortir avec une personne bi, car forcément je vais aller voir ailleurs, je ne suis pas quelqu’un de stable… Ou bien, on a peur qu’au bout d’un moment je fasse un choix entre les « deux genres », …. Il y a également une certaine sexualisation : forcément si je suis bi, je dois aimer les coups d’un soir, et les plans à plusieurs ; forcément je suis plus ouvert d’esprit voir polyamoureux. Je me suis même retrouvé une fois devant une personne qui essayait de me « dégouter des vulves ».

Claudia: Oui, comme je le disais, par des lesbiennes ou des amis gays. On te dit que la bisexualité n'existe pas. Le mot pansexualité fait rire. Or, je suis pansexuelle et pas bi.e. Donc on rigole en te disant que tu n'es pas encore au clair sur ta sexualité. Sauf que je suis pansexuelle et que j'ai d'ailleurs une tendance à être plus attirée par les gens qui se trouvent entre deux genres, les non binaires, les agenres, les gens non stéréotypés m'attirent énormément. Je suis moins attirée par les hommes cis et les femmes très stéréotypées féminines, par exemple. Donc mon orientation sexuelle est encore plus précise que ça. Et malgré tout, non, "la pansexualité n'existe pas et je ne suis qu'une personne qui veut se faire mousser", visiblement.

Lyne: Ma première expérience de biphobie était dans un espace LGBTI+. Personneà part la personne qui m’accompagnait) ne semblait vraiment réagir à cette remarque, mettant cela sur le ton de la blague, l’alcool, etc. Je ne sais pas si d’autres gens ont réagi, nous avons quitté la soirée peu après l’incident.

Quels sont les préjugés/stéréotypes auxquels tu fais face et qui sont liés à ta bisexualité/pansexualité ?

Jason: Les bi/pansexuel-le-s ne sont pas des gens stables, ils/elles vont voir ailleurs, ils/elles ne cherchent pas de relations sérieuses.

La bi/pansexualité n’est pas une vraie orientation, au bout d’un moment je vais obligatoirement devoir « choisir » selon eux.

Les bi/pansexuel-le-s sont super ouverts d’esprit, acceptent beaucoup de choses, les plans à plusieurs, les coups d’un soir, …

Les bi/pansexuel-le-s aiment tout et n’ont pas beaucoup de critères pour choisir leur partenaire.

Claudia: Je suis en couple avec une personne non binaire assignée homme, et je suis agenre assignée femme (avec une expression de genre entre le neutre et le féminin, lui étant pareil). Donc on s'imagine que :

  • Je suis une femme en couple hétéro (ce qui a l'art de m'énerver) car vu que je suis mariée avec "un homme" (non), je suis forcément redevenue hétéro. Sauf que les femmes me plaisent toujours, que je ressens toujours de l'attirance pour des femmes, des hommes et des personnes non binaires/agenres, malgré mon couple exclusif. Donc non, je ne suis pas redevenue hétéro. Je suis pansexuelle et je le serai toujours.
  • Un autre stéréotype est que si je suis pansexuelle, je dois forcément avoir trompé, ou envie de tromper mon conjoint, ou envie d'un plan à trois. Ce n'est pas le cas. Nous sommes un couple exclusif. Ca ne m'empêche pas de trouver quelqu'un.e d'autre attirant.e.
  • Un autre stéréotype est que ma pansexualité est de la luxure et donc que je suis forcément "une cochonne" qui accepterait de me faire matter en pleine action avec une femme par un homme cis hétéro.
  • Un autre est que je ne suis pas pansexuelle du tout et que c'est juste parce que c'est à la mode.
  • Je suis supposée être attirée par "tout le monde" et donc être une "chaudasse", car vu que j'aime tous les genres, j'aime forcément tout le monde... Ce n'est pas le cas.
  • Un dernier est que j'ai une sexualité forcément plus active que les hétéros et les homosexuel.le.s. Euh non, en fait.

Lyne:

  • Les partenaires hommes pensent systématiquement que je veux faire des plans à trois avec leurs copines (alors qu’il est possible que je ne sois pas attirée par elles).
  • Les femmes hétéro pensent que m’embrasser en soirée c’est juste fun et une expérience (ce qui délégitimise mon orientation romantique/sexuelle).
  • Certaines personnes en couple hétéro et polyamoureux délégitimisent la relation que je peux entretenir avec la femme du couple car je ne suis pas une menace (n’étant “qu’une femme” et eux ne voyant les relations comme uniquement sexuelles et phallocentrées).
  • Si je relationne avec un homme je suis hétéro (nope toujours pas).
Est-ce que ta bisexualité/ta pansexualité a pu poser problème dans certaines relations amoureuses ?

Jason: Au départ, il est arrivé qu’il y ait une certaine anxiété au début d’une relation de la part de mon/ma partenaire car les préjugés du dessus son très ancrés. Mais au bout de quelques temps,  cette anxiété disparaît. Ces partenaires se rendant bien compte que ces préjugés sont faux. Il arrive aussi que des partenaire, un peu jaloux-ses,  le soient d'autant plus du fait je puisse être attiré par plus de monde (ce qui est aussi un stéréotype : un hétéro peut avoir autant de partenaire qu’un-e bisexuel-le/pansexuel-le, ….) mais ce n’est pas quelque chose qui a provoqué  la fin d’une relation en tous cas.

Claudia: Non, parce que j'ai toujours été dans le couple exclusif et je n'ai jamais vraiment eu d'homme jaloux de tout ça... Ça excite pas mal les pervers présumés hétéros cis en général. Mais on n'a pas essayé de me forcer à un plan à trois ou ce genre de chose. AAu contraire, ma pansexualité est un atout dans mon (vieux) couple, vu que mon conjoint a pu se rendre compte de sa propre bi/pansexualité. Et on est très ouvert sur le sujet de nos attirances, etc.

Lyne: Elle ne pose plus de problème depuis que j'apprends à mieux choisir avec qui je relationne. Ayant vécu des relations où les préjugés mentionnés ci-dessus se sont manifestés dans mes relations, j'énonce clairement mon orientation et dézingue d'entrée de jeu tous ces commentaires ou ces idées préconçues avant de relationner avec quelqu'un·e. Tous les exemples précédents sont issus de mon expérience directe.

Trouves-tu que la société a tendance à minimiser et/ou invisibiliser la biphobie/panphobie ? Si oui, pourquoi ? Si non, pourquoi ?

Jason: Je n'ai jamais vraiment réfléchi à cette question. N'ayant vécu que peu de bi ou panphobie dans mon entourage, et m'identifiant assez facilement aux représentations autour de moi, je n'ai pas ressenti un problème de bi/panphobie énorme. Mais je me rends malgré tout compte qu'on n'en parle jamais. J’ai plutôt l’impression que l’"HOMOPHOBIE" est pour beaucoup de gens le terme valise pour parler de toutes les LGBTQI+phobies. Maintenant pour répondre à la question, je ne pense pas que la société minimise plus la biphobie que l’homophobie (qui sont en quelque sorte le même combat au final). Je pense que c'est plutôt un manque de connaissance et de reconnaissance de la communauté LGBTQI+ à cause des normes sociétales.

Claudia: Je pense qu'on est moins nombreux·euses que les personnes homosexuelles, mais je n'en suis pas sûre. Je pense que l'on est relativement peu visible à la télé ou dans les séries. Il y a des personnages bi (dans The Haunting of Hill House par exemple), mais ce n'est pas encore la joie. Je pense qu'on parle plus d'homophobie que du reste... Je pense aussi que vu que la plupart de la bi/panphobie que j'ai subie était de l'ordre de la raillerie, dans notre culture "si c'est une vanne c'est pas grave". Sauf que la vanne repose sur des stéréotypes, des clichés, de la haine... Je dirais qu'on est invisibilisé·e·s, oui. Je dirais qu'on est aussi moins nombreux·ses. Je dirais aussi que la société a besoin de temps pour accepter les différences, donc on a relativement accepté l'homosexualité (quoi que), les personnes trans* commencent à être tout doucement au centre des médias... Alors les gens "entre deux", on attend un peu dans le placard, en attendant. Pas moi, je suis out. Mais on est quand même pas en permanence en train de s'out(er) non plus.

Lyne: L'invisibilisation est très présente, car elle est très liée à l'hétéronorme et aux normes de genre, piliers encore prévalents dans nos sociétés. La perspective féministe éclaire beaucoup sur la biphobie. Le système patriarcal perpétue des injonctions très précises sur qui chacun·e doit aimer et comment chacun·e doit performer son genre. En tant que femmes et minorités de genre, quid de relationner également avec des membres du groupe social qui nous oppressent ? De cela découle également la nécessité des espaces sans le groupe social oppresseur pour exister, se rencontrer et peut-être démarrer des relations (par exemple des lieux et espaces lesbiens). Donc avoir un partenaire du groupe dominant peut être un frein à l’acceptation de soi et le sentiment de légitimité de rejoindre ces espaces (même si on les laisse à la maison, ils font quand même partie de nos vies.) Cette réflexion est également valable pour les femmes/minorités de genre hétéro et les espaces féministes. Et en tant qu’homme dans un système patriarcal et homophobe, quid de relationner également avec d’autres hommes car cela est perçu comme une marque de “non-virilité” ? Et où toutes traces de féminité est vue comme inférieur ? Les questions de genres sont encore jugées "complexes à comprendre" pour les discours publics, donc comprendre que les normes de genres et le système patriarcal influent également sur les personnes bi et pan est jugé comme encore plus complexe. Les représentations des personnes bisexuelles dans les médias sont d'ailleurs scandaleuses - ou nous sommes des diables-ses tentateurs-rices, ou nous sommes les méchants de l'histoire, ou nous sommes gay/hétéro à la fin de l'histoire.

Selon toi, quelles sont les pistes de solutions qui aideraient à lutter contre la bi/panphobie ?

Jason : Éducation, éducation, éducation. Pour moi c’est le maître mot. Une éducation des enfants sur les sujets du genre et de la sexualité mais aussi des parents. Un enfant qui a des propos LGBTQI+phobe les tient forcément de quelque part … Je pense qu’il faut donc éduquer les gens sur ces sujets, car quand on connait quelque chose, cela ne nous fait plus peur. Peut-être faut-il aussi travailler sur la représentation des orientations dans la société (ce qui, j’ai l’impression, est quand même en train d’évoluer). Comme dit précédemment, je ne me suis jamais senti sous-représenté, mais la multitude de jeunes qui vivent des situations très difficiles et qui ont du mal à s’accepter prouve bien qu’il y a encore du chemin à faire.

Claudia: C'est une grande question. Plus de visibilité déjà. Je pense que la visibilité est la première chose. Puis une lutte pour l'éducation inclusive. La lutte contre les stéréotypes de genre aussi. Tout ça.

Lyne: Pour continuer sur ma réponse précédente, la piste principale que je vois est dans la déconstruction de ces normes de genres, ces normes hétéro, cette binarité hétéro ou homo. Cela va prendre du temps, mais en vue de l’essor féministe qu’on observe depuis les années 2010, on est en chemin, il faut juste persévérer. En complément, on peut aussi : avoir une meilleure représentation de la communauté dans les médias et la culture en montrant les mille manières d’être bisexuel·le, éduquer les jeunes générations de la communauté à l’histoire des luttes LGBTI+, interpeller les commentaires ou comportements biphobes de tous-tes (intra ou extra communautés), sortir d’une focalisation unique sur les relations sexuelles et reparler d’amour comme le cœur de nos vies, etc.


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