14 juillet : Journée internationale des personnes non-binaires

Et si on avait grandi dans un monde non binaire ?

Le 14 juillet, à l’occasion de la Journée internationale de la visibilité non-binaire, nous avons lancé un projet éditorial sensible, politique et profondément humain.

Nous avons posé une question simple : À quoi ressemblerait un monde où la non-binarité serait visible, reconnue, partagée ?

Vous avez été nombreus·es à répondre. Avec des textes intimes. Des lettres à l’enfant qu’on a été. Des souvenirs réinventés. Des rêves lucides.

Ces contributions, libres et vibrantes, dessinent un autre imaginaire collectif.

Elles ouvrent des espaces où l’on peut enfin se dire, se relier, se réparer.

Aujourd’hui, nous vous partageons ces fragments de récits, entre réel et fiction, tous ancrés dans le besoin de représentation, de reconnaissance, d’espoir.

Merci à celleux qui ont pris le temps d’écrire, de rêver, de déposer leur voix. Merci aussi à celleux qui liront, transmettront, écouteront. Les mondes à venir se dessinent aussi dans ces mots-là. Et ils commencent ici.

Ce monde où je me réveille, les gens semblent si insouciants et souriants, ils portent des vêtements colorés plus ces costumes sombres, ce bien-être m'envahit à me mêler à la foule, je ne sans aucun jugement, je suis enfin transparente et libre, tiens ma grand-mère de retour sur terre, si généreuse elle m'embrasse et me félicite d'être moi, je m'étais endormie, où je me cache dans mes draps, honteuse de ce que les autres pensent de moi et pourtant, je n'ai pas choisi cette époque a la mentalité nociceptive d'intégration à leurs groupes d'éducation patriarcale politico-sociale binaire.

Moi militante ? Je referme les yeux où ma douceur de vivre je la dois à vous, dans ce champ de fleurs des chrysalides explose de couleurs, car nous existons de l'intérieur et notre parfum est l'amour.

Texte et dessin d'une bénéficiaire de la Maison arc-en-ciel du Brabant Wallon

Depuis toujours, on m'a habillé·e au féminin, parce que c'est le genre avec lequel je suis venu·e au monde. Robes, tops, maillots deux pièces, sandales, talons,.. jai testé beaucoup de choses, sauf le maquillage, car je ne supportais pas den avoir sur le visage.

Durant la majorité de mon enfance, j'ai enchaîné les vêtements féminins à foison, comme on habille une Barbie selon les histoires que l'on se raconte.

Puis, vers mes 12 ans, vient la puberté et les changements corporels. Je me suis souvent demandé-e pourquoi j'avais une poitrine naissante et pas les autres [garçons]. Je ne savais pas encore le formuler à l'époque, mais c'est peut-être à partir de là que débutent mes questionnements sur mon apparence corporelle, et mon genre finalement, sans savoir le formuler plus clairement.

Ce n'est que vers le début de ma vingtaine que j'ai essayé de casser ce schéma qui ne me correspondait plus. Je me suis sentie nu•e en jupes ou robes, et tellement vulnérable.

Cela fait maintenant environ un an que je me défini comme personne non binaire. C'est un terme tellement libérateur, notamment parce que je peux enfin dire « ça c'est moi », après avoir passé des années dans le doute. Je suis non binaire et j'en suis fier·e !

Ash

Lettre à l'enfant que j'étais

Tu te souviens du jour où tas pleuré parce qu'on tavait obligé à choisir une file: fille ou garçon ? Tu étais paralysé, le cœur en tempête, parce que rien ne correspondait. Imagine maintenant que ce jour-là, quelqu'un se soit agenouillé face à toi pour te dire : «

T'inquiète pas, tu peux rester juste toi. »

Imagine des histoires où le héros te ressemble. Imagine des adultes qui te disent que tout est possible. Que les vêtements ne te trahiront jamais, qu'ils seront là juste pour t'habiller, pour t'amuser. Imagine ne pas devoir cacher tes rêves dans des journaux intimes fermés à clé. Imagine grandir avec ce mot « non-binaire », comme une clé magique pour expliquer qui tu es sans devoir t'excuser.

Je t'écris depuis cet endroit. Tu verras, c'est doux ici.

F.

Il y a 30 ans, j'aurais aimé...

J'aurais aimé savoir qu'on pouvait ne pas se sentir fille, mais pas se sentir garçon non plus.

J'aurais aimé qu'on utilise un seul et même pronom pour l'entièreté des êtres humains.

J'aurais aimé savoir qu'une fille n'était pas obligée de se raser les jambes et les aisselles, et qu'un garçon pouvait le faire.

J'aurais aimé savoir que tout le monde pouvait porter des jupes et des robes et des talons et mettre du maquillage et du vernis à ongle et deux boucles d'oreilles. J'aurais aimé me rendre compte plus tôt que des habits unisexes sont en fait des habits de garçon.

J'aurais aimé savoir que le terme "garçon manqué" n'était pas un compliment.

J'aurais aimé savoir qu'un garçon pouvait jouer à la poupée.

J'aurais aimé savoir pourquoi les coupes "femmes" étaient plus chères que les coupes "hommes", même si la femme en question a des cheveux courts.

J'aurais aimé savoir pourquoi une femme pouvait prendre le nom de son mari et pas l'inverse.

J'aurais aimé voir des hommes pleurer.

J'aurais aimé que les expériences et les lieux plus spécifiques aux garçons et aux filles soient moins opaques, plus partagées, plus connues par tout le monde. J'aurais aimé apprendre le fonctionnement du système reproducteur avant la rhéto. J'aurais aimé apprendre le fonctionnement des urinoirs avant de les utiliser pour la première fois en tant qu'adulte. J'aurais aimé que les magasins de vêtements ne séparent pas les habits par genre et par étage. J'aurais aimé ne jamais lire "Les hommes viennent de Mars et les femmes de Vénus"

J'aurais aimé apprendre ce qu'est le féminisme, la masculinité toxique, l'hétérosexualité normative, la taxe rose, le mansplaining, le patriarcat.

J’aurais aimé entendre parler de consentement.

J'aurais aimé apprendre la distinction entre sexe, genre et expression de genre.

J'aurais aimé savoir qu'il était possible de transitionner. Un peu, beaucoup, passionnément.

J'aurais aimé apprendre tout ça... mais pas tout d'un coup. À petites gouttes, pas à gros flot à 36 ans. J'ai détesté vivre toutes ces années en tant que fille puis femme, mais j'apprécie avoir pu expérimenter cette vie jusqu'au bout.

J'ai 40 ans, et maintenant que je sais tout ça, ma vraie vie commence enfin.

Maël·le

À 12 ans, je rêvais secrètement d'avoir les cheveux longs mais jamais on na laissé ce désir respirer. Dans ce monde imaginaire où j'ai grandi, je n'ai pas besoin de cacher mes envies. Mes cheveux poussent librement, personne ne demande pourquoi, personne ne me demande « ce que ça veut dire ». Les photos scolaires montrent juste mon sourire fier, mes amitiés sont légères parce que personne ne s'accroche à ces étiquettes qui étouffent.

C'est drôle, dans ce souvenir reconstruit, je me rends compte à quel point un peu d'espace aurait pu changer toute mon adolescence.

J.

Si j'avais grandi dans un monde non-binaire, mon corps aurait été un jardin plutôt qu'un champ de bataille. Je l'aurais regardé fleurir sans le juger, sans lui demander pardon. Les miroirs auraient été mes alliés et non des ennemis. À l'école, on aurait parlé de genre avec douceur et simplicité, comme on parle de musique ou de peinture.

Les adultes m'auraient donné la permission d'être flou, d'être multiple, d'être humain tout simplement. J'aurais traversé l'adolescence sans honte, avec cette certitude profonde que mon existence n'était pas une question mais une réponse parmi d'autres.

Aujourd'hui je choisis de planter ces graines pour les autres, parce que ce monde existe déjà dans nos cœurs.

L.

Je me rappelle le regard de ma mère quand je lui ai demandé si on pouvait être ni fille, ni garçon. Elle na pas su quoi me répondre, mais j'ai senti qu'elle aurait aimé pouvoir le faire. Alors, imaginons ensemble qu'elle ait pu dire : « Bien sûr, pourquoi pas ? »

Imaginons les fêtes d'anniversaire sans les cadeaux roses ou bleus imposés. Imaginons des après-midi entières à jouer librement, sans devoir expliquer pourquoi je préférais tel ou tel jouet. Mes amitiés n'auraient pas été coincées par des attentes extérieures.

Aujourd'hui, j'essaie d'être l'adulte que j'aurais aimé rencontrer enfant. Celui qui offre aux jeunes un simple sourire, une oreille attentive, et cette phrase si précieuse : « Tu as le droit d'exister tel que tu es. »

P.

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